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Tranformation digitale des ETI – Décryptage

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Les ETI ont maintenant conscience de l’importance de la transformation digitale. La prochaine étape ? En faire une réalité business. Décryptage de Sébastien Hours, DG de Keria, et Pierre-Olivier Brial, Directeur Général Délégué de Manutan, qui président la commission digitale du METI.

Les ETI dans la première phase de la transformation digitale

Les résultats de la deuxième édition du baromètre de la maturité digitale des ETI françaises sont tombés : au sein des entreprises de taille intermédiaire, la prise de conscience est là. « La transformation digitale est désormais considérée comme un vrai axe de la stratégie d’entreprise », détaille Sébastien Hours. Cette prise de conscience fait entrer les ETI françaises dans ce que les dirigeants du METI qualifient de « premier stade » de la transformation digitale.

À cette étape de la digitalisation, trois enjeux « prioritaires » pour les ETI :

1- S’équiper des solutions technologiques les plus adaptées. Les dirigeants doivent à présent pleinement intégrer le digital dans leurs activités. Cela passe par la création d’un plan de transformation digitale, « avec des actions concrètes et mesurables », que les chefs d’entreprise devront potentiellement porter avec une équipe dédiée.

2 – Adapter les compétences des équipes aux nouveaux outils et process mis en place au sein de l’entreprise.

3 – Créer un écosystème favorable, grâce à des partenariats stratégiques. Les ETI doivent apprendre à collaborer avec les start-ups innovantes de manière agile, mais aussi avec de nouveaux acteurs comme les GAFA, « qui ont des pratiques très différentes des nôtres sur certains axes comme la sécurité et le traitement des données », détaille Sébastien Hours. « Ce nouvel écosystème nécessite également la présence des grands acteurs nationaux et internationaux. »

Aux yeux de Sébastien Hours et de Pierre-Olivier Brial, les ETI françaises possèdent déjà plusieurs atouts pour mener à bien leur transformation digitale. La taille est un « facteur essentiel », estime Sébastien Hours. « Elle nous rend réactifs, très agiles et nous donne également une vraie capacité à nous projeter sur le moyen-long terme. Nous mesurons aussi très fortement l’efficacité ou non d’un projet. » Autre atout mentionné : la mission des ETI, « bien au-delà » de l’aspect purement économique. « Plus des deux tiers d’entre elles sont des sociétés familiales. Parce qu’on ancre le digital dans un projet qui dépasse le cadre financier, nous sommes capables d’engager les collaborateurs dans la transformation, avec des points de repères fixes », indique Pierre-Olivier Brial.

Passer d’une prise de conscience à une réalité business

Pour encourager la collaboration avec les start-ups, le METI a notamment lancé le groupe de travail French Tech ETI, mettant en relation les ETI et les jeunes pousses de la French Tech, et des collaborations avec des associations comme France Digitale, « très portées sur ces leviers-là ». Fin 2017, le METI a décidé de lancer une « véritable dynamique », pour encourager les entreprises françaises à accélérer leur transformation digitale. « L’enjeu de cette année est de passer d’une prise de conscience à une réalité business, avec de vrais cas pertinents de réussite sur le plan de la transformation d’entreprise. »

En tant que dirigeants, Sébastien Hours et Pierre-Olivier Brial connaissent bien les challenges auxquels sont confrontées les entreprises durant leur mue digitale. « Chez Keria, nous intégrons la transformation digitale depuis une dizaine d’années dans nos plans stratégiques et au sein de chaque activité qui le nécessite », révèle Sébastien Hours. Le digital impacte aujourd’hui les trois axes principaux de la stratégie d’entreprise du leader français du luminaire : le développement et la conception des collections produits, l’expérience client, et l’évolution des modes d’organisation et des process.

Parmi les nombreuses révolutions digitales menées au sein de Keria, Sébastien Hours en détaille trois. La première concerne le développement et la conception produit, avec la création en partenariat avec une start-up de l’application smartphone Keria LED, qui centralise toutes les ampoules connectées du client. « L’utilisateur a de nouvelles solutions intelligentes d’éclairage, et de notre côté, nous pouvons mieux analyser les usages de nos produits pour en développer de nouveaux. ». Ensuite, une application sur tablette qui permet aux équipes de Keria d’élaborer des produits sur-mesure directement avec le client en magasin. Enfin, la consultation en direct sur les réseaux sociaux de la communauté de Keria, afin de l’impliquer « dès la conception d’un nouveau produit » dans le choix du design et de la couleur.

Deuxième révolution, qui touche l’expérience client : l’utilisation de la réalité augmentée. « Nous travaillons actuellement avec une start-up grenobloise sur des solutions de réalité augmentée pour que les clients puissent visualiser un produit comme s’il était placé chez eux. »

Dernière révolution, la mise en place d’une meilleure collaboration en interne. « Nous avons été parmi les premiers à tester l’application Workplace by Facebook en 2016. Les équipes interagissent en temps réel, peuvent lancer des projets et trouver des solutions de manière rapide et collaborative. »

Du côté de Manutan, « on a démarré le digital il y a 16 ans, à l’origine comme une extension de notre métier », explique Pierre-Olivier Brial. Du catalogue, l’entreprise passe au e-commerce qui devient un moyen de fédérer l’ensemble des filiales du groupe. « Nous avons été parmi les premiers à proposer des catalogues électroniques, ce qui nous a permis d’élargir la distribution à de nouveaux interlocuteurs. » Mais le digital ne se résume pas au e-commerce. Face à une multitude d’acteurs lançant leur site de vente en ligne, « nous avons dû évoluer car notre modèle devenait de moins en moins différenciant. » La Direction Générale décide de revoir la mission de Manutan : « Créer une relation de qualité, basée sur la sincérité et la responsabilité. Le digital représentait un fantastique moyen d’aller vers ce projet. »

La transformation digitale de Manutan s’est également traduite par deux révolutions. La première sur la culture de l’entreprise :  la Direction Générale de Manutan présente à ses équipes la digitalisation comme un moyen « d’hybrider la relation humaine et la technologie. » Pour apprendre la relation client et les bonnes pratiques digitales à ses équipes, Manutan se dote d’une université interne, « qui travaille sur la relation que chacun a avec soi-même, avec les autres et avec ses clients. » Pour sa seconde révolution, les équipes de Manutan s’envolent en direction de la Silicon Valley pour y découvrir le « Minimum Viable Product » et la culture du « test and learn ». Résultat ? Dès son retour en France, Manutan créé un « Lab », au sein duquel sont étudiés les besoins et les problématiques des clients en vue de concevoir rapidement un premier produit en mesure d’y répondre : le fameux MVP. Le groupe passe ainsi de quelques gros chantiers s’étalant sur plusieurs années à une multitude de petits projets plus rapides à tester. « En janvier par exemple, nous avons sorti un produit réalisé en seulement trois mois », détaille Pierre-Olivier Brial. « Nous sommes désormais plus agiles, pragmatiques et notre rapport à l’échec a totalement changé. »

En ordre de marche vers une « ETI Nation » ?

Les ETI françaises ne sont pas seules pour aborder leur transformation digitale. En prenant leur fonction au sein de la commission digitale du METI, Pierre-Olivier Brial et Sébastien Hours se sont donnés pour mission de les encourager. Ce coup de pouce commence par un travail sur la visibilité et l’attractivité des ETI, qui possèdent d’importants besoins en termes de recrutement digital. « Elles doivent renforcer leur attractivité face aux start-ups et aux grands groupes ! », s’exclame Sébastien Hours. « Peu de personnes le savent, mais si vous regardez sur la période de 2009 à 2015, les ETI ont créé plus de 335 000 emplois nets, soit la catégorie d’entreprise qui a créé le plus d’emplois sur la période », ajoute Pierre-Olivier Brial. En défendant la cause des ETI auprès des pouvoirs publics, les dirigeants comptent aussi sur le gouvernement pour soutenir les ETI françaises autant que les start-ups et les grands groupes.  « Le plan PACTE, porté par Bruno Le Maire, montre qu’il y a déjà une vraie volonté de les écouter », précise Sébastien Hours.

Le METI rêve aussi d’une « ETI nation ». « La France ne compte que 5 000 ETI contre 12 000 en Allemagne », expose Pierre-Olivier Brial. La botte secrète de l’Hexagone ? Ses nombreuses start-ups, que le METI voit comme un « vrai réservoir d’ETI potentielles via le digital. » L’idée : donner aux start-ups l’envie d’évoluer, et de ne pas considérer le rachat comme seule option. « Je précise tout de même que le digital n’est pas une solution miracle », ajoute Sébastien Hours. « Il s’agit simplement d’une évolution des process et des solutions qu’il est possible d’apporter aux clients. Ce n’est pas le digital qui va porter et transformer la France et le développement des entreprises ! » Les dirigeants voient deux conditions pour faire faire de l’Hexagone une « ETI nation » : la création d’un écosystème favorable à une collaboration forte start-up-PME-ETI-grands groupes, qui permettra aux plus petites de grossir plus rapidement qu’aujourd’hui. La seconde, plus générale, intègre une évolution de « la législation, de la fiscalité et de l’état d’esprit entrepreneurial », conclut Sébastien Hours.

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"Grande mobilisation patronale" : Patrick Martin (MEDEF) menace de réagir si les impôts des entreprises augmentent
Si les impôts augmentent, il y aura une « grande mobilisation patronale ». Ces mots de Patrick Martin, président du Medef, résonnent comme un avertissement. Et pas un petit. Dans un contexte où les entreprises – et particulièrement les PME et ETI, véritables piliers de notre économie – peinent à reprendre leur souffle, la perspective d’une nouvelle pression fiscale apparaît non seulement déraisonnable, mais dangereuse. Par Franck Boccara Patrick Martin s’est exprimé, ce samedi 13 septembre dans interview publiée sur le site du Parisien, sur la perspective d’un alourdissement de la fiscalité sur les entreprises, en particulier à travers la fameuse taxe Zucman, proposée par la gauche. Une taxe sur les très hauts patrimoines qui inclurait l’outil de travail dans son calcul. Une disposition qui n’existait même pas dans l’ancien ISF. Une hérésie selon Martin : « Pour certaines entreprises – dans la tech notamment – qui valent beaucoup mais ne font pas encore de résultats ou ne distribuent pas de dividendes, instaurer cette taxe serait même une forme de spoliation et les condamnerait à la vente ». Le message est clair : à force de vouloir ponctionner toujours plus, on risque de détruire l’outil productif au lieu de le renforcer. Et ce ne sont pas des grandes multinationales toutes-puissantes que l’on parle ici, mais de structures souvent fragiles, en croissance, innovantes, qui font l’avenir de notre tissu économique mais qui sont capables de suivre cette « grande mobilisation patronale ».

PME et ETI : la colonne vertébrale de l’économie française

En France, plus de 99 % des entreprises sont des PME. Elles représentent environ 6 millions d’emplois, sans compter les ETI, ces entreprises de taille intermédiaire qui font le lien entre les PME et les grands groupes. Ce sont elles qui embauchent, forment, exportent, invitent à innover. Ce sont elles qui font vivre les territoires. Mais elles sont aussi les premières à souffrir lorsqu’on touche à la fiscalité. Contrairement aux géants capables d’optimiser ou de négocier leur implantation, une PME ne peut pas délocaliser sa production à l’autre bout du monde du jour au lendemain. Elle n’a pas de service juridique tentaculaire, ni de réserve financière abyssale. Quand on augmente les impôts, c’est elle qui trinque.

13 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires : l’année de trop ?

Toujours selon Patrick Martin, les entreprises françaises vont devoir faire face à 13 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires en 2025. C’est un chiffre qui fait tourner la tête. Et pourtant, dans les couloirs ministériels, certains semblent considérer cette ponction comme un « ajustement raisonnable ». Mais peut-on raisonnablement asphyxier les forces productives du pays et espérer en même temps relancer l’économie ? Le président du Medef en doute fortement : « Les entreprises ne peuvent pas supporter de nouveaux impôts ou des hausses d’impôts supplémentaires. Au contraire, il est même urgent de desserrer le frein à main pour relancer l’investissement. »

Le spectre de la promesse envolée : la baisse de la CVAE

Autre point de tension : la CVAE (Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises), impôt de production que le gouvernement avait promis de supprimer. Une promesse qui n’a pas été tenue, et qui pèse lourdement sur les entreprises industrielles, déjà soumises à une concurrence mondiale féroce. C’est un impôt que peu de nos voisins appliquent avec autant de vigueur. Et pendant que d’autres baissent la pression pour stimuler la réindustrialisation, la France semble prête à resserrer l’étau.

Une « grande mobilisation patronale » dans la dignité (et le calme)

Face à ce contexte tendu, Patrick Martin ne menace pas de bloquer le pays, ni d’envoyer des tracteurs sur les Champs-Élysées. Mais il appelle à une mobilisation massive, sous forme de meetings : « On ne descendra pas dans la rue. On réunira massivement, comme ce fut le cas par le passé, des milliers de chefs d’entreprise, de tout profil, pour bien signifier que nous refusons d’être la variable d’ajustement de politiques contraires à l’intérêt du pays. » Un message fort, mais exprimé avec la retenue d’un homme d’entreprise. Car il ne s’agit pas ici de revendiquer des privilèges, mais de rappeler que sans entreprises, il n’y a pas de richesses à redistribuer.

Taxer l’outil de travail : l’erreur stratégique

La fameuse taxe Zucman, proposée par certains élus, semble incarner ce que le monde de l’entreprise redoute le plus : une fiscalité idéologique, déconnectée des réalités économiques. En intégrant l’outil de travail dans le calcul du patrimoine, cette taxe risque de pénaliser ceux qui investissent, prennent des risques, et parfois même ne se versent pas de salaire pendant des années. Les PME et les ETI ne demandent pas de « grande mobilisation patronale » mais seront contraintes à s’y joindre si on ne les écoute pas. Elles demandent simplement de pouvoir travailler, investir, se développer sans être constamment pointées du doigt ou ponctionnées davantage. Parce qu’au fond, comme le dit Patrick Martin, ce qu’elles refusent, c’est d’être la variable d’ajustement d’une politique budgétaire qui peine à faire ses preuves. Ce n’est pas une hypothèse. C’est la réalité de nombreuses entreprises innovantes, dans la tech, l’industrie verte ou les services, qui réinvestissent tout pour croître et créer de l’emploi. Les taxer sur une valorisation parfois virtuelle, c’est tuer dans l’œuf l’esprit d’entreprendre.

Entre fiscalité punitive et incertitude chronique

L’autre danger, c’est l’instabilité. Trop de réformes fiscales, trop d’annonces, trop de revirements. Les entreprises ont besoin de prévisibilité, pas d’un budget qui change tous les six mois. Sans visibilité, comment investir ? Comment embaucher ? Comment innover ? La fiscalité doit être un levier, pas un frein. En accablant les entreprises, on risque de provoquer l’effet inverse : moins d’investissements, moins d’emplois, moins de recettes fiscales à long terme.

Desserrer le frein à main

L’expression de Patrick Martin fait mouche. Oui, il faut desserrer le frein à main. Redonner confiance aux entrepreneurs. Alléger la fiscalité. Simplifier les règles. Et surtout, reconnaître le rôle central que jouent les entreprises dans la vitalité économique du pays et ne pas les contraindre à manifester lors d’une « grande mobilisation patronale » pour s’en souvenir.
Congés payés et arrêts maladie
On pourrait croire à une blague de comptoir ou à une chronique absurde d’un pays aux lois ubuesques, mais non : c’est bien une décision de la Cour de cassation qui agite actuellement les milieux économiques. En cause ? Une jurisprudence qui bouscule l’un des piliers de la relation entre employeurs et salariés : les sacro-saints congés payés. Dorénavant, un salarié qui tombe malade durant ses vacances peut tout bonnement reporter ses jours de repos. Et ce n’est pas une option théorique : c’est un droit. Par Franck Boccara C’est peu dire que cette nouvelle a provoqué des sueurs froides chez les dirigeants d’entreprises, qui y voient non seulement une source d’insécurité juridique, mais surtout une ponction supplémentaire sur des équilibres financiers déjà fragiles. Amir Reza-Tofighi, président de la CPME, n’a pas mâché ses mots. “Bienvenue dans le monde des fous”, a-t-il lancé, résumant avec une formule choc ce que beaucoup pensent tout bas dans les rangs patronaux : que la France, en matière sociale, semble parfois glisser vers l’absurde. Pour comprendre ce qui soulève tant de crispations, il faut revenir à la genèse du problème. En septembre 2023, la Cour de cassation s’est alignée sur la jurisprudence européenne, jugeant que les salariés ne devaient pas perdre leur droit aux congés payés s’ils étaient en arrêt maladie au moment où ils étaient censés les prendre. Une sorte de “deuxième chance” offerte aux malchanceux dont la grippe ou l’entorse sont venues gâcher les vacances d’été. Jusque-là, on pourrait presque saluer la bienveillance d’un tel dispositif. Mais ce qui passe difficilement, c’est la mécanique comptable que cela déclenche en coulisses. Les entreprises se retrouvent en effet à devoir reconstituer des droits à congés, recalculer des soldes de jours, gérer des plannings déjà saturés… et tout cela avec des conséquences budgétaires réelles. Plus encore, la décision implique que les jours de congés payés peuvent désormais être pris en compte dans le calcul du seuil déclencheur des heures supplémentaires. Une subtilité technique, certes, mais qui pourrait alourdir la facture de manière significative dans certains secteurs où l’organisation du travail repose déjà sur une logique tendue. Pour les PME et les ETI, dont les marges sont souvent plus étroites que celles des grands groupes, la décision est vécue comme une injonction supplémentaire dans un climat déjà chargé. L’inflation, les hausses des coûts de l’énergie, les contraintes réglementaires croissantes : autant de facteurs qui grignotent peu à peu les capacités d’investissement et de développement des structures les plus agiles. En ajoutant à cela une gestion des ressources humaines de plus en plus encadrée par des jurisprudences difficilement anticipables, certains dirigeants finissent par se demander s’ils dirigent une entreprise ou s’ils naviguent dans un labyrinthe juridique permanent. Du côté des syndicats, on applaudit en revanche une avancée qui renforce la protection des salariés. Le droit au repos est un principe fondamental, rappellent-ils, et il est légitime qu’un arrêt maladie ne vienne pas léser ce droit. En somme, l’employeur ne devrait pas être “gagnant” à chaque fois qu’un salarié est contraint d’interrompre son congé pour raison de santé. Une logique de justice sociale, certes, mais dont l’application concrète reste complexe pour les petites structures. Car au-delà des débats idéologiques, il y a la réalité du terrain. Comment gérer les plannings lorsque les retours de congés deviennent imprévisibles ? Comment anticiper les coûts associés à ces reports de jours ? Et surtout, comment intégrer cette nouvelle contrainte dans des outils RH souvent conçus pour la simplicité ? Autant de questions qui restent sans réponses claires à ce stade, et qui nourrissent le malaise d’une partie du tissu entrepreneurial français. Le gouvernement, quant à lui, tente d’arrondir les angles. Des discussions sont en cours pour encadrer l’application de la jurisprudence, en précisant notamment les délais de report ou les conditions de justification de l’arrêt maladie. Mais la tension reste palpable, et l’affaire a pris une dimension symbolique. Elle illustre à quel point la complexité normative peut devenir un frein à la compétitivité, surtout dans un contexte où la flexibilité est devenue un mot d’ordre pour bon nombre d’acteurs économiques. Certaines voix, plus modérées, rappellent que ce type de décision s’inscrit dans une tendance européenne à renforcer les droits sociaux, et qu’il appartient aux entreprises de s’adapter à cette nouvelle donne. Elles soulignent également que les salariés ne tirent aucun plaisir à être malades pendant leurs congés payés, et qu’il est donc logique de leur permettre de profiter de ce à quoi ils ont droit. Mais sur le terrain, les DRH s’arrachent les cheveux, entre tableaux Excel, demandes de report, justificatifs médicaux et incertitudes sur les textes applicables. Alors, cette décision marque-t-elle une avancée sociale ou une nouvelle entrave à l’activité économique ? Peut-être un peu des deux. Ce qui est certain, c’est qu’elle révèle une fracture grandissante entre une logique de droit social protecteur et les exigences d’un monde économique qui évolue vite, très vite. Et dans ce décalage, ce sont souvent les entreprises de taille intermédiaire ou modeste qui trinquent les premières. En attendant d’éventuelles clarifications législatives ou réglementaires, les chefs d’entreprise vont devoir faire avec. Adapter leurs systèmes, revoir leurs pratiques RH, se former encore et toujours à une législation mouvante, et garder le cap malgré les turbulences. Quant aux salariés, ils auront désormais une bonne raison supplémentaire de ne pas culpabiliser en glissant un arrêt maladie entre deux jours de plage : la loi est avec eux. Bienvenue, donc, dans une nouvelle ère des congés. Une ère où le droit au repos s’accompagne d’un casse-tête comptable, où le principe de protection du salarié devient un sujet de tension pour les entreprises. Une ère où les bonnes intentions finissent, parfois, par coûter cher.
Les entreprises familiales surperforment-elles les autres sociétés ? Si oui, pourquoi ? Quelle structure présente la meilleure rentabilité en termes d’ouverture du capital ou de génération dirigeante ? Où trouve-t-on les groupes familiaux les plus performants ? Autant de questions qui peuvent se poser au moment d’investir dans une société dirigée et/ou détenue par une même famille. 1- Les entreprises familiales superforment-elles les autres société ?Carmignac

Selon la base de données Carmignac Family 500, un investissement réalisé en janvier 2004 dans une société familiale aurait pratiquement triplé 18 ans plus tard, à un taux de croissance annuel moyen de 10,2%. Le même investissement dans une entreprises non familiale aurait été multiplié par 2,5 à un taux de croissance annuel moyen de 7,9%.

Parmi les raisons expliquant la surperformance de groupes dirigés par une même famille figurent notamment :

  • un levier financier plus faible. Le ratio dette nette sur Ebitda montre que les liquidités sont supérieures aux dettes pour les entreprises familiales (-0,07) alors qu’il s’élève à 0,9 (soit environ une année de remboursement) pour les sociétés non familiales ;

  • une meilleure rentabilité. Le taux de rentabilité des capitaux propres (« Return on Equity » ou ROE) était en octobre 2023 de 15,1% pour les sociétés familiales et leur rentabilité des capitaux investis (« Return on invested capital » ou ROIC) s’élevait à 10%. Au même moment, le ROE des entreprises non familiales était de 13% et leur ROIC, de 8,4%. Cela démontre une meilleure gestion des groupes familiaux par leurs dirigeants ;

  • une stratégie à long terme combinée à une plus forte aversion au risque. Cherchant à faire croître leurs profits et à stabiliser la génération de bénéfices de leur société, les dirigeants d’entreprises familiales développent une vision à long terme. À cela s’ajoute une plus grande aversion au risque et une très forte implication des fondateurs alors qu’une dimension patrimoniale existe avec la volonté de transmettre la société aux générations suivantes.

2- Quelles génération dirigeantes privilégier ? Carmignac L’adage selon lequel « la première génération construit, la deuxième développe et la troisième dilapide l’héritage familial » se vérifie-t-il ?  En comparant l’évolution des actions de différentes sociétés familiales sur une même période (janvier 2005-octobre 2022), le rendement des titres observés recule à mesure qu’augmente la génération aux commandes. Ainsi, l’action des sociétés dirigées par la première génération affiche un rendement pratiquement deux fois plus élevé que celui des titres d’entreprises aux mains de la cinquième génération après dix-huit ans. Cette différence s’explique notamment par les importants réinvestissements nécessaires pour adapter et développer l’activité de la société à mesure que vieillit l’entreprise. En outre, les dirigeants de groupes familiaux multigénérationnels prêtent une grande attention au ratio rendement/risque en matière d’investissement. Cela les contraint à réfléchir régulièrement à la meilleure façon d’utiliser leur capital sur le long terme pour répondre aux besoins essentiels de leur entreprise – le « capital patient » –, ce qui peut peser sur le rendement de l’entreprise. 3- Quelle est la part d’actionnariat la plus efficaces ? Carmignac

En raison d’un meilleur alignement d’intérêts entre les actionnaires et les dirigeants, les actions des entreprises détenues à plus de 50% par la même famille affichent une croissance de leur rendement bien plus élevée que les autres entre janvier 2004 et octobre 2024.

Les entreprises majoritairement détenues par les fondateurs ou une seule et même famille subissent également beaucoup moins les exigences des actionnaires minoritaires dont les intérêts peuvent diverger de ceux des dirigeants et/ou ne pas toujours correspondre au développement de l’entreprise sur le long terme.

4- Où se trouvent les entreprises familiales qui surperforment le plus les autres en bourse ? Carmignac À la faveur d’une meilleure gouvernance que dans les marchés émergents, les entreprises familiales implantées dans des pays développés surperforment davantage les groupes non familiaux en Bourse. Or la qualité de la gouvernance des entreprises est une notion de plus en plus importante pour les investisseurs. En outre, les marchés émergents ont tendance à être plus volatils et à présenter une dispersion plus forte des rendements, due principalement à une prime de risque plus élevée. 5- Quelle taille d’entreprise familiale présente le meilleur rendement ? Carmignac

La base de données Carmignac Family 500 montre qu’un investissement réalisé en janvier 2004 dans une entreprise familiale affichant une capitalisation boursière de plus de 50 milliards de dollars aurait été multiplié par 4,5 à fin octobre 2024. Le même investissement dans une entreprise valorisée entre 10 milliards et 50 milliards aurait été multiplié par 2,8, contre un multiple de 3,4 pour les sociétés d’une capitalisation boursière comprise entre 2 milliards et 10 milliards de dollars et un multiple de 3,1 pour les entreprises de moins de 2 milliards.

Les très grosses entreprises sont souvent plus matures. Pour cette raison, elles parviennent à dégager des rendements moins volatils, y compris en période de crise. Elles disposent aussi de ressources financières plus importantes avec une meilleure stabilité en matière de profitabilité et de rentabilité. Les petites capitalisations boursières sont plus vulnérables aux chocs de marché et peuvent négocier moins facilement les taux d’intérêt auxquels elles empruntent de l’argent, ce qui augmente le coût de leur effet de levier pour croître.

Par ailleurs, si les sociétés de petite taille font preuve de davantage de dynamisme et présentent un potentiel de croissance plus élevé, nous constatons une plus grande stabilité de la progression de l’activité des grosses entreprises. Ces dernières comptent également davantage de leaders sectoriels.

Attention cependant à ne pas tirer de conclusion trop hâtive. Une entreprise familiale, de très grosse taille, implantée dans un pays développé, détenue majoritairement par ses fondateurs et dirigée par la première génération n’est pas nécessairement synonyme d’investissement fructueux.

La réalité peut être nettement plus complexe et beaucoup d’autres points sont à prendre en compte (gouvernance, secteur, situation propre de chaque entreprise…). D’autres analyses et des rencontres avec la direction de l’entreprise sont également nécessaires, tout comme l’est la prise en compte des cycles de marché pour s’adapter à la conjoncture économique.

Pour ces raisons, il peut être préférable de confier ses économies à des experts, capables d’étudier et de suivre régulièrement ce type d’entreprises qui méritent que l’on s’y intéresse.

Sources : Carmignac, base de données Carmignac Family 500, Octobre 2024

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