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Frais généraux : sept pistes pour réduire vos coûts

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Chasser le gaspi. Si l’expression a vieilli, réduire les coûts reste un des leviers principaux pour la rentabilité. L’exercice, pas toujours agréable sur le moment, réserve in fine de bonnes surprises. Vade-mecum à suivre…

La maîtrise des coûts est indispensable quand les marges commerciales se réduisent. Même si l’heure est à la reprise dans votre secteur, ce n’est pas une raison pour se livrer à des dépenses excessives. A l’inverse, réduire les frais généraux en période de vaches maigres peut démobiliser le personnel, alors que sa motivation est plus nécessaire que jamais pour acquérir de nouveaux contrats ! C’est donc en période d’abondance qu’il faut maîtriser ses frais généraux, les réduire ou obtenir plus pour le même montant, afin d’anticiper sur une période moins faste. « Ils représentent 15 à 25 % du chiffre d’affaires d’une entreprise. Selon les postes, on peut économiser jusqu’à 30 % et, par conséquent, générer jusqu’à 6 % de résultat supplémentaire », rappelle Christophe Fillon, directeur chez Lowendal Group. Quant au mode opératoire, pas de mystère : il n’y a que deux voies, maîtriser ses coûts, ou ses consommations. François Lacoste, PDG de NSE, une entreprise florissante, circonscrit les dépenses non primordiales en période de croissance. « Pour tout ce qui est papier-impression-fournitures de bureau, nous avons fixé une enveloppe constante malgré un chiffre d’affaires en hausse », dit l’entrepreneur auvergnat, ancien agriculteur, qui a gardé son bon sens paysan. L’esprit d’économie se cultive en permanence !

1re piste : Centraliser
Les frais généraux relèvent souvent de tout un chacun. L’entreprise a abandonné les achats à des secrétariats non responsabilisés ou aux opérationnels. Sans parler des « achats sauvages ». Alors, les achats hors production sont dispersés et pas gérés. « Les achats périphériques sont souvent d’un montant supérieur aux achats stratégiques et sont éclatés entre de multiples comptes », explique Thierry Mercier, consultant chez CSC, un spécialiste du conseil en intégration de systèmes d’information et externalisation. Le directeur informatique achète lui-même ses ordinateurs, le patron du marketing choisit ses prestataires, le DRH ses sociétés d’intérim… aucun n’entre dans le giron du patron des achats ! A défaut de pouvoir vous payer un poste de directeur des achats à temps plein encadrant trois acheteurs spécialisés, vous pouvez déjà confier la responsabilité à une seule et même personne. Laquelle recensera les besoins et identifiera dans l’existant « qui a quoi ». « En faisant l’inventaire, je me suis aperçu que des commerciaux disposaient de deux véhicules de société », note Manuel Gonzales, responsable de services généraux, qui a oeuvré dans de grandes entreprises comme Air liquide. « Centraliser permet d’obtenir au moins 10 à 20 % d’économie sur les contrats », estime Thierry Cadiot, membre de l’Arseg, Association des responsables de services généraux. « J’ai procédé à une centralisation des achats sur projet et des frais généraux. J’ai mis en place une politique budgétaire. Cela me permet de réaliser 10 % d’économie », remarque aussi Pascal Colin, PDG de Keynectis, entreprise parisienne spécialisée dans la signature électronique. « Notre entreprise, Famar-L’Aigle, fait partie d’un groupe de sous-traitance pharmaceutique qui compte trois sites de production en France. En centralisant nos achats, nous avons pu réduire de 11 % le contrat restauration, de 11 % le contrat nettoyage et de 53 % le contrat location-entretien des vêtements de travail », témoigne pour sa part Liliale Lambert, la responsable des services généraux (RSG). L’entreprise procède actuellement à un audit sur le remplacement et la rationalisation de son parc d’imprimantes et espère économiser 45 000 euros sur cinq ans. Club-Internet, filiale de Deutsche Telekom, a adopté le principe de la disjonction des rôles : les demandeurs ne sont pas les acheteurs, ce qui limite les dérives. « Jusqu’ici, nous n’avions pas de procédure définie », confie le directeur administratif et financier, Marc Sevray. Les achats étaient confiés aux opérationnels. Avec l’aide d’un cabinet, Club-Internet a créé à l’automne 2006 une direction des achats. Le service aura un rôle d’expertise sur les différents marchés et de contre-pouvoir par rapport aux opérationnels. « L’opérationnel exprime un besoin, et l’acheteur négocie le meilleur prix. »

« J’ai réduit la surface des bureaux d’un tiers et je sous-loue »
« Nous sommes installés rue du Château-des-Rentiers, dans le XIIIe arrondissement de Paris. Pour optimiser la surface au sol, certaines équipes techniques sont passées du bureau individuel cloisonné au plateau, et les bureaux ont été disposés en étoile. Réduire la taille des bureaux n’est pas une mesure populaire, mais c’est une question de courage et, en quinze jours, les gens se sont habitués. J’économise un tiers de la surface totale. Et je sous-loue les mètres carrés dégagés, ce qui rapporte 8 000 euros. »

2e piste : Vérifier les contrats, comparer et renégocier !
La personne chargée de suivre les frais généraux doit éplucher les contrats en cours et les tarifs tous les ans. Même si leur exécution ne pose aucun problème. Ne vous engagez pas sur des contrats pluriannuels, surtout dans des marchés très évolutifs comme les fluides ou la téléphonie. « On ne pense pas assez à renégocier les abonnements et forfaits (téléphonie mobile, internet…). Je les revois tous les ans. Je change régulièrement d’opérateur. Comme ces derniers privilégient les nouveaux clients par rapport aux anciens, autant en profiter », confie Pascal Colin (Keynectis). Pensez donc à renégocier systématiquement, selon le bon vieux principe : « Qui ne tente rien… » Club-Internet en France a ainsi renégocié les conditions de location de ses locaux (une surface de 700 m2). Résultat : une économie de 200 000 euros sur un an ! L’important est de professionnaliser votre démarche de consultation : de quoi avez-vous vraiment besoin ? Comment allez–vous faire pour l’acheter au meilleur prix ? Au besoin, le recours à un expert (payé au résultat) peut vous permettre d’aller plus loin dans le questionnement sur le modèle économique d’opérateurs qui compliquent à l’envi leur grille tarifaire (propreté, informatique, télécoms…). Les chasseurs de coûts comme Alma Intervention, Lowendal, CSC, K-Buy, Factea, Cost House et consorts ont bâti des grilles de questions pointues pour obtenir plus de transparence dans les prix. Enfin, gardez l’oeil et l’esprit ouvert. Soyez à l’affût des opportunités. « Pour mes déplacements, je guette les offres promotionnelles sur internet, explique encore Pascal Colin. Sur des vols que j’effectue régulièrement, comme Paris-Toulon ou Paris-Munich, j’étais habitué aux tarifs des compagnies nationales. Un jour, une commerciale m’a trouvé un billet aux horaires habituels qui coûtait 50 % moins cher, via une agence de voyages en ligne. »

3e piste : Lancer des appels d’offres
Scandaleux ! « Des écarts de prix de 200 % pour un même service (téléphonie ou data), et ce, chez le même opérateur, selon que l’entreprise surveille ses achats télécoms ou pas », constate un consultant de Cristal Decisions (réducteur de coûts), qui a développé une expertise sur le marché des télécoms. Sur ce poste précis, trop souvent, les entreprises se laissent hypnotiser par le marketing très au point des fournisseurs, qui uniformisent leur discours… L’antidote ? Analyser ses dépenses, ses modes de consommation, estimer ses vrais besoins et… être un peu plus exigeant dans sa démarche achats ! Lancer un appel d’offres peut s’imposer. Cela doit devenir un réflexe pour les achats lourds. « Je discute toujours avec au moins deux fournisseurs ; avec un seul, vous pouvez vous faire baratiner, confie Bernard Capel, le RSG du groupe de presse DI Services ( La Tribune, Investir, Radio Classique…). Si un fournisseur de mobilier de bureau essaie de me vendre des postes de travail standards à 2 000 euros, je ne le retiens pas, car je sais que les prix oscillent actuellement autour de 1 200 euros. » N’hésitez pas à faire jouer la concurrence. « En lançant un nouvel appel d’offres en 2005, nous avons pu acheter des prestations de logistique et de stockage de qualité équivalente pour moins cher. Nous avons obtenu une baisse des coûts de 800 000 euros », raconte de son côté Marc Sevray (Club-Internet).

4e piste : Faire le tri parmi les fournisseurs
Vous avez répertorié vos fournisseurs, vous les avez regroupés. Pour aller au bout du ménage, reste à les trier et… à en éliminer. Peugeot SA, EADS… les grands donneurs d’ordre qui font actuellement le ménage dans leurs fournisseurs et sous-traitants ne se privent pas de mettre en oeuvre ces préconisations serinées par les cost-killers et conseils en organisation. « Comme eux, vous pouvez éliminer les fournisseurs de classe C (petits achats de petit montant) », préconise Olivier Brongniart, fondateur de Cost House, spécialiste de l’optimisation des dépenses. Un grand nombre de vos fournisseurs ne sont pas directement en rapport avec votre coeur de métier. Ils représentent peu en volume mais coûtent en temps administratif. Eliminer une grande partie des fournisseurs non stratégiques et chronophages vous épargnera le rituel de les voir deux fois par an pour leur dire : « Vous êtes trop cher ! » Par catégorie d’achats, vous pouvez retenir le(s) fournisseur(s) préféré(s) avec le(s)quel(s) vous allez travailler, plutôt que de le(s) multiplier. Avec ce fournisseur privilégié, vous pourrez instaurer un dialogue constructif et, si besoin, passer un contrat pluriannuel. Pour réaliser de vraies économies dans la durée, il vaut parfois mieux retenir le mieux-disant que le moins-disant. Si vous achetez uniquement un prix, vous pouvez récupérer des consommables incompatibles avec votre équipement. « Je me suis retrouvé avec un lot de papier toilette acheté à un prix imbattable, mais dont les feuilles n’étaient pas prédécoupées et les rouleaux mesuraient 50 cm de large ! » déplore un responsable des services généraux qui avait été alléché par des prix défiant toute concurrence. Bref, achetez intelligemment ! Pensez à anticiper. Tout marché connaît des hauts et des bas : le consulting et autres prestations intellectuelles notamment. « Acheter ponctuellement à très bon prix quand le marché est bas si vous n’avez pas négocié dans la durée est très risqué. Quand le marché redeviendra florissant, vous paierez alors très cher, explique Marc Sevray, de Club-Internet. De plus, vous n’aurez pas les meilleurs consultants, mais des juniors que vous formerez. »

« En imprimant le papier recto verso, nous avons économisé 10 000 euros en un an »
« Dans notre activité, nous consommons beaucoup de papier pour les tests. En imprimant le papier sur les deux faces, nous avons économisé 10 000 euros en un an sur le poste impression. Je limite aussi les déplacements physiques en menant des réunions par visioconférence. Enfin, tout le monde prend l’avion en classe touriste, moi compris. »

5e piste : Tendre vers le zéro papier
« Nous avons beau être une société internet, nous passions encore nos commandes par papier jusqu’à il y a peu ! » confesse Marc Sevray. Depuis, la société a informatisé et simplifié ses procédures, et met actuellement en place l’automatisation des bons de commande. Club-Internet réalise ainsi des gains de productivité considérables en comptabilité. « Dans la société où je travaille, en dématérialisant, on est passé de 670 factures papier par an à 60 factures électroniques. On frôle le zéro papier, sauf facture récapitulative annuelle. Et c’est écologiquement vertueux », explique Thierry Cadiot, membre de l’Arseg. Cela représente aussi un gain de temps : « La demande formulée le matin peut être satisfaite le soir, ce qui est quasi impossible avec des procédures papier réclamant plusieurs signatures d’autorisation. » Autre outil à envisager, la carte d’achat (P-Card, pour Purchasing Card), moyen de paiement dématérialisé. Selon Accenture, elle réduit de 80 % le coût de traitement d’une transaction ! Et selon Deloitte, elle permet de réduire la paperasse liée au compte fournisseurs de 50 %. Apparue dans les années 1990, destinée aux achats hors production (fournitures de bureau, petit outillage, frais d’intérim ou de voyages d’affaires…), elle se développe en Europe depuis quelques années : selon l’Apeca (Association des professionnels européens de la carte d’achat), il y a 3 millions de porteurs environ. Elle fonctionne par des accords entre l’entreprise, ses fournisseurs et les établissements financiers.

6e piste : Res-pon-sa-bi-li-ser les salariés
La vie de bureau consomme trop. Fournitures de bureau, papier… la gabegie règne ! Un seul exemple : on imprime ses mails parce que c’est plus confortable de lire sur papier que sur écran. « Un salarié moyen imprime 1 200 feuilles par mois au bureau, et 44 % de ces feuilles ne servent que pour la journée », a calculé Xerox. Réflexe basique et indolore : faire appel au civisme des salariés, signaler à leur attention les excès éventuels constatés. Moins indolore : en amont, limiter au juste nécessaire la liste des produits accessibles aux salariés. En établissant des catégories restreintes d’achats, on limite les dérives : la rentrée des classes, terreur des services généraux, commence dans les entreprises françaises en juin…

« Nous avons remplacé l’éclairage permanent par des détecteurs de mouvement »
« Nous économisons 35 % sur la facture d’électricité grâce à une habile gestion technique du bâtiment : la consommation d’électricité, qui était de 1,35 million de kW/heure en 2005, va passer à 850 000 kW/heure en 2007. Nous avons par exemple remplacé l’éclairage permanent dans les escaliers par des détecteurs de mouvement : ils éteignent la lumière s’ils ne détectent pas de présence humaine. La facture 2004 atteignait 91 000 euros, en 2007 elle sera ramenée à 58 000 euros. »
Vous pouvez aussi mettre en place un plan d’action basique : il sera d’autant plus efficace que vous aurez bien communiqué en interne. Rappeler de fermer les fenêtres quand la climatisation ou le chauffage sont allumés ou d’éteindre la lumière en sortant d’une pièce peut faire économiser des sommes rondelettes ! Toutefois, si le personnel tarde à adopter ces gestes simples, vous pouvez aussi parier sur la loi du moindre effort. « Nous avons supprimé les imprimantes personnelles : comme il faut se déplacer, les gens impriment moins ! » explique un membre de l’Arseg. Un autre, pour alléger la facture d’eau, a fait installer des robinets à cellule infrarouge (qui s’éteignent automatiquement) dans les WC. « Investissement très vite amorti… » Mais, pour responsabiliser le personnel, rien de mieux que le PDG qui montre l’exemple et paie de sa personne. « Quand on se déplace, y compris moi, c’est uniquement en classe économique pour les vols moyen et long courrier. Le prix du billet peut varier du simple au double ! » explique ainsi François Lacoste, le PDG de NSE.

7e piste : Mettre en place des outils de reporting
Dernière piste dans la quête des économies : suivre à la trace l’évolution des consommations et détecter les anomalies. « Un site nous commande 150 euros d’une fourniture au lieu de 15 euros habituellement, nous l’appelons pour vérifier le montant », témoigne le RSG d’une entreprise multisites. Les grands fournisseurs proposent de tels outils. Primo, ils permettent des comparaisons dans les consommations : « Quand un de mes vendeurs passe soixante-dix heures par mois au téléphone et ne vend pas, alors qu’un autre consomme quatre heures et réalise le plus gros chiffre d’affaires mensuel, je m’interroge », gronde le PDG d’une PME lyonnaise. Secundo, ces outils font prendre conscience aux salariés qu’il y a un contrôle. Cela peut les aider à changer de comportement… « Les gens doivent se sentir contrôlés pour s’autodiscipliner », lâche Olivier Brongniart (Cost House). C’est humain, les chefs de service ont du mal à dire à leurs collaborateurs qu’ils abusent. Envoyer à chaque utilisateur de téléphone professionnel un relevé de sa consommation avec la date, la durée et l’heure peut dissuader ou limiter les abus. « Un collaborateur fait le plein d’essence le vendredi et le dimanche soir. Lui envoyer un double de son relevé de consommation doit lui faire prendre conscience que ça laisse des traces et qu’il ne doit pas gruger l’entreprise ! » explique Thierry Cadiot (Arseg). Mais s’agissant de la sacro-sainte bagnole, le problème est culturel. Un cost-killer l’a appris à ses dépens : « Le comité de direction d’une grande entreprise m’a un jour demandé de réduire les coûts du parc automobile. Je procède à un audit, d’où il ressort que la plus grande gabegie vient du PDG. Sa voiture est celle qui coûte le plus cher à l’entreprise. J’ai dû manger mon chapeau ! » L’exemple, bon ou mauvais, vient toujours d’en haut…

Le saviez-vous ?

10 à 20 % d’économie c’est l’effet levier d’une centralisation des achats.
Un salarié moyen imprime 1 200 feuilles par mois et 44 % de ces feuilles ne servent que pour la journée (source : étude Xerox).
> Les factures d’eau aux entreprises comportent 75 % d’erreurs ! (source : Cristal Decisions). Trois entreprises sur quatre paient une facture excessive.
> Il existe des écarts de prix de 200 % pour le même service… chez le même opérateur téléphonique !
Airbus a mis en place un catalogue électronique de fournitures pour réduire le nombre de validations et les coûts de traitement administratif. Résultat : en France, les commandes ont explosé ; en Allemagne, les salariés se sont disciplinés !

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La veille en intelligence économique
La veille, pilier de l’intelligence économique, offre aux décideurs une longueur d’avance en identifiant les signaux faibles. Elle leur permet ainsi d’anticiper leurs défis et leurs opportunités, et ce, quel que soit le secteur d’activité ou la taille de l’entreprise. Par David Malicorne et Alexandre Kahn Diriger une entreprise c’est, à divers degrés, maîtriser son environnement. Le contrôle de l’information, qu’elle soit d’origine interne ou externe est primordial, ce qui fait de l’intelligence économique un guide dans sa capacité à décider. La veille comme outil d’aide à la décision Qu’elle soit économique ou concurrentielle, la veille consiste à surveiller, identifier et collecter des informations utiles pour son activité. Elle implique d’être en éveil sur un ou plusieurs sujets d’intérêt et d’être averti automatiquement lorsqu’une information utile surgit. À l’inverse des études marketing analysant les actions passées, la veille se pose comme un outil offrant une information en continu. Capable de s’intégrer dans une multitude de contextes et d’enjeux, elle est avant tout un support d’aide à la décision pour les dirigeants d’entreprise. Elle s’adresse aux entreprises de toutes les tailles – selon les mots de l’ancien directeur du renseignement au sein de la DGSE Alain Juillet, l’intelligence économique est adaptée à toute structure, « de la grande multinationale à la boulangerie du coin ». La veille est donc un des maillons indispensables aux défis primordiaux des entreprises : innover, gérer le risque et optimiser ses ressources. Innover, d’abord, via l’identification des nouvelles pratiques concurrentielles, des nouveaux modes de consommation ou des évolutions réglementaires. Gérer le risque, ensuite, en demeurant informé de son environnement. Nouvel entrant sur le marché, percée technologique d’un concurrent existant, partenaire commercial accusé de pratiques illégales, changements soudains des besoins clients… La possibilité d’être informé en amont de l’évolution d’un risque, qu’il faudra avoir identifié au préalable, est une première étape pour adopter les changements stratégiques et demeurer compétitif. Enfin, optimiser les ressources. Les PME et ETI en recherche d’économie peuvent identifier des avantages concurrentiels et ainsi conforter leur assise en investissant sur leurs points forts. Elles peuvent aussi orienter leur capital sur les domaines où elles sont en retard afin de rattraper celui-ci et se maintenir dans la course. Si chacun peut être convaincu de l’utilité d’intégrer la veille à ses dispositifs, aujourd’hui retenons que 90 % des actions hostiles d’intelligence économique sont remportées, selon Nicolas Moinet, praticien-chercheur en intelligence économique… Veiller, c’est maîtriser son environnement En effet, prendre rapidement conscience d’une menace peut changer la donne. Ce fut par exemple le cas d’une entreprise canadienne, qui en 2021 a été confrontée à la concurrence déloyale d’un nouvel entrant. Ce fabricant de châssis porte-conteneurs voyait ses parts de marché fondre rapidement. Pour cause : un concurrent chinois pratiquant des prix cassés, à la faveur de subventions (illégales) de son gouvernement. En veillant les actualités de son marché, l’entreprise canadienne aurait pu identifier le développement de ce concurrent, y apporter une vigilance particulière en adaptant son dispositif de surveillance. De plus, une veille sur les tarifs pratiqués lui aurait permis de conclure rapidement à un dumping. Outre la détection des menaces sur son marché intérieur, la connaissance des risques internationaux peut aussi s’avérer capitale. L’instabilité géopolitique a un impact direct sur bon nombre d’entreprises et la guerre en Ukraine en est l’exemple le plus significatif. Du jour au lendemain, l’approvisionnement nécessaire à la production de produits de tout type a été lourdement ralenti voire interrompu. Selon une étude du Conseil national des achats, 26% des entreprises françaises ont élaboré un plan d’achats spécifique en cas d’invasion de Taïwan par la Chine. Face à ces aléas pouvant paraître lointains, l’usage de la veille permet aux entreprises d’être informées des actualités géopolitiques sur des zones distinctes. Ainsi elles peuvent identifier et se prévaloir des risques liés à leurs fournisseurs. La veille naît de la stratégie Avant d’évoquer les outils de veille, il est important de définir sa stratégie. Que l’on soit une PME, une ETI ou un grand groupe, la mise en place d’une veille nécessite en amont de se poser trois questions. Tout d’abord, quels types d’informations je recherche ? Pour me développer, ai-je besoin d’informations spécifiques sur un sujet distinct ou ai-je principalement besoin de me tenir informé des actualités d’un domaine, d’un secteur ? Ensuite, quelle est la temporalité de ma veille ? Ai-je besoin de veiller mon environnement sur un temps long, ou faut-il que je me focalise sur un sujet à forts enjeux pendant une période donnée ? Enfin, quelles ressources humaines et financières puis-je y allouer ? En tant que chef d’entreprise, ai-je les moyens de mobiliser des forces vives à temps plein ou est-ce que ma veille doit être simple et capable d’alimenter mes équipes en informations ? Une fois le cadre de la veille défini, vient la question des outils. Qu’elles soient payantes, partiellement ou entièrement gratuites, les solutions ne manquent pas. Du côté des leaders du marché, on trouve des outils de veille automatisée capables de suivre une multitude de sources et de générer des newsletters concises et sur mesure. Ces solutions sont, néanmoins complexes à mettre en place et coûteuses. Mais il existe aujourd’hui un large éventail d’outils peu onéreux, facile à programmer et à utiliser, soi-même. À condition d’être un minimum initié aux méthodes et fonctionnalités de la veille. S’entourer d’experts en veille est-il obligatoire ? La veille, ce sont des méthodes, des pratiques, des outils. C’est aussi un état d’esprit : être curieux, rester attentif à ce qui se passe dans son environnement. L’exercice de la veille peut être directement pratiquée par le chef d’entreprise, qui dispose de ses propres sources d’informations, notamment par le réseau ou son expertise sectorielle. Toutefois, les acteurs spécialisés offrent des modèles de veille qui s’adaptent à chaque secteur, modèle et budget. Ils possèdent des méthodologies et des savoir-faire permettant de concevoir des veilles exhaustives, à même d’identifier des signaux faibles dans des environnements complexes. Recourir à des experts en veille offre ainsi la garantie de capter toute information clé. Dans la grande famille de l’intelligence économique, la veille constitue la première brique. Elle permet de mettre en exergue les zones de risque et d’opportunité devant être identifiées en amont de toute action plus spécifique. Elle s’articule par exemple avec les exercices d’influence, de lobbying ou de due diligence qui s’en nourrissent
Le télétravail a bouleversé l’usage des bureaux. De nombreuses entreprises ont réduit leur surface pour viser un nombre de postes bien inférieur à leur effectif. En effet, entre les salariés en clientèle, en télétravail, en arrêt maladie ou en congés, il n’est plus pertinent d’avoir des bureaux qui pourraient couvrir un taux d’occupation de 100 % du personnel. C’est à partir de ce constat qu’est né le corpoworking. Par Arnaud Adler – Président de Coworkea Néanmoins, à ce jour, toutes les entreprises n’ont pas la chance d’avoir pu rendre leur bail ; en effet les périodes triennales sont très contraignantes, et certains engagements vont même parfois au-delà ; c’est le cas lorsqu’on a bénéficié en début de bail de franchise de loyer. Heureusement, une solution existe : le Corpoworking (contraction de « Corporate » et « Coworking »). Cette solution consiste à sous-louer ses espaces vacants à des entreprises extérieures, sous une forme flexible. Les contrats utilisés sont des contrats de prestations de services, les mêmes que ceux utilisés dans les espaces de Coworking classiques, afin de se garder la possibilité de récupérer les bureaux en cas de besoin (recrutement massif suite à la signature d’un client important par exemple).

Les bénéfices du Coworking

Le Corpoworking a plusieurs avantages. Tout d’abord, pour l’entreprise accueillante, c’est une source de revenue significative. Dans la mesure d’ailleurs, où les espaces sont loués avec du service (mobilier, internet, ménage…), de manière flexible, et sur des surfaces plus petites, le rendement au mètre carré est supérieur à celui d’une location classique en 3/6/9. Si la motivation financière est importante, elle ne doit pas être la seule, car la cohabitation avec d’autres équipes doit rester « agréable ». En effet, il n’est pas rare de constater la création de partenariats ou de relations d’affaires. On constate également des amitiés se former. Dans tous les cas, c’est un enrichissement, tant pour les collaborateurs que pour le patron. En effet, ce dernier peut trouver chez ses homologues, sans lien hiérarchique, une oreille attentive voire un effet miroir sur des problématiques business. L’intelligence collective connait de nombreux bénéfices. Les chefs d’entreprises, même de secteur différent, ont en commun de nombreux sujets transverses. Le brassage de population représente aussi une aide au recrutement car cela devient un véritable facteur d’attractivité. Aujourd’hui, il y a une telle pénurie de ressources, que chaque détail compte pour attirer les talents. L’ambiance informelle de travail compte énormément, surtout pour les jeunes générations motivées qui veulent construire leur réseau professionnel et gagner en expérience, en présentiel. Par ailleurs, pour les petites équipes, les jeunes recrues sont ravis de pouvoir échanger à l’heure du déjeuner avec d’autres jeunes recrues de leur génération ; et c’est compréhensible. Enfin, il y a également une logique RSE, puisque la mutualisation de parties communes (couloirs, salles de réunion, sanitaires, cuisine) et des moyens (chauffage), fait que l’empreinte carbone est significativement réduite. Les bâtiments sont mieux exploités, et cela réduit le besoin d’en construire de nouveaux. Qu'est-ce que le corpoworking et comment l'implémenter au sein de ses locaux ? - Isospace

La confidentialité

La confidentialité est souvent identifiée comme le frein majeur au Corpoworking. En effet, on redoute souvent que des données fuitent. Si votre entreprise est secret-défense, évidemment, oubliez. Mais sinon, il faut avoir conscience que les dangers proviennent beaucoup de l’interne, avec un commercial qui part avec un fichier client ou d’Internet avec la propagation de virus. Les voisins de bureaux ne sont jamais le plus grand danger, d’autant que dans la plupart de cas, les bureaux sont fermés, et ferment à clé. Pour le réseau internet, il est possible de faire tirer une fibre dédiée ou d’avoir un réseau privé grâce à des switchs infogérés. Une de ces deux solutions suffit à rassurer les plus précautionneux.

Comment démarrer ?

La mise en place d’un Corpoworking peut se faire de manière autonome, sans forcément recourir à un prestataire. Il suffit de passer un peu de temps à « markéter » les bureaux avec de belles photos et un descriptif pertinent, puis à les référencer auprès de partenaires spécialisés dans le flex-office ou d’autres réseaux tels que les réseaux sociaux. Le marketing du bouche à oreille peut fonctionner, mais il connaitra vite ses limites. Un professionnel pourra vous faire économiser du temps et aura un réseau plus large pour faire la promotion de vos bureaux, avec l’accès aux sites d’immobilier professionnel et aussi via un réseau de brokers avec qui il est en contact. Certains font également de l’approche directe et contactent directement les chefs d’entreprises susceptibles d’être intéressés afin de les informer de l’existence de bureaux à proximité de leur bureau actuel. Cette approche est très appréciée lorsqu’une entreprise voisine veut réduire (lorsqu’elle est en fin de bail) ou augmenter sa surface. Un professionnel maximise les chances de trouver un locataire rapidement et donc permet de réduire la durée de vacance locative.

En conclusion

Le Corpoworking peut être une expérience très intéressante, humainement et financièrement. Elle aura d’autant plus de succès que l’entreprise accueillante sera prévenante avec ses locataires. Le Corpoworking est flexible réversible. L’entreprise accueillante garde la faculté de récupérer ses bureaux en cas de besoin. Le Corpoworking est un cycle : certaines entreprises accueillantes par le passé, deviennent des Corpoworkeurs. La finalité est davantage l’usage de bureau que de savoir qui détient le bail ou qui est propriétaire. Le Flex dans tous ses états !
Mark Denham et Obe Ejikeme, gérants du fonds Carmignac Portfolio Family Governed, livrent dans cette interview leur vision des entreprises familiales et des avantages qu’elles présentent. Ils partagent également leurs convictions en termes de zones géographiques et expliquent leur intérêt pour les grandes et moyennes entreprises. Quel facteur déterminant motive, selon vous, les investisseurs à choisir un fonds axé sur les entreprises familiales ? Mark Denham : Des études ont démontré que l’actionnariat familial a un effet positif sur les performances des entreprises. Les recherches que nous avons menées à partir d’un historique de données sur 15 ans se rapportant aux entreprises familiales, montrent qu’elles sont en mesure de générer des rendements supérieurs à la moyenne, soutenues par l’effet « skin in the game », c’est-à-dire une implication significative de la famille ou de l’entrepreneur au sein de l’entreprise. Les entreprises familiales privilégient souvent une réflexion stratégique sur le long terme, ce que nous apprécions. Ces entreprises se caractérisent également par une plus grande attention portée au client, une forte détermination et une grande capacité d’adaptation, pouvant refléter l’état d’esprit de la famille ou du fondateur. Par ailleurs, la gouvernance est un élément clé à prendre en compte, d’autant plus lorsqu’on investit dans une entreprise familiale, car elle peut avoir un impact décisif sur le succès de l’entreprise. Qu’entendez-vous par entreprises familiales ? Obe Ejikeme : Lorsque nous élaborons notre univers d’entreprises familiales, nous recherchons des sociétés dont au moins 10 % des droits de vote sont détenus par des familles, des fondateurs, des fondations ou encore des trusts. Nous nous concentrons sur le contrôle plutôt que sur la propriété de l’entreprise, car nous voulons nous assurer que la vision stratégique et l’effet  » skin in the game  » restent alignés. Lors de la constitution de cet univers, nous adoptons également une approche quantitative et qualitative afin de pouvoir identifier les entreprises détenues par des participations croisées familiales. Il s’agit généralement d’entreprises plus petites, mais dotées d’une longue histoire, n’est-ce pas ? Denham : Nous nous efforçons de diversifier notre stratégie d’investissement de manière appropriée. En effet, nous différencions les entreprises familiales en fonction des régions, des secteurs et des capitalisations boursières, mais aussi de la génération. D’un point de vue géographique, nous nous concentrons principalement sur les États-Unis et l’Europe. D’un point de vue sectoriel, ces entreprises sont concentrées dans les secteurs des biens de consommation, des soins de santé, des services financiers, de l’industrie et de la technologie. C’est pourquoi nous privilégions ces secteurs au sein de notre portefeuille. A l’inverse, nous n’avons que peu ou pas d’exposition à l’énergie, aux matières premières et aux services publics, secteurs dans lesquels les entreprises familiales sont peu présentes. La plupart de ces entreprises sont contrôlées majoritairement par des membres de la famille fondatrice, ce qui augmente le risque de liquidité. C’est pourquoi nous nous concentrons sur les grandes et moyennes capitalisations. Nous pensons également que les entreprises familiales prospères ont tendance à voir leur valeur de marché augmenter ce qui les propulsent souvent dans l’univers dans moyennes et grandes capitalisations. Pensez-vous que le caractère familial apporte un aspect défensif à l’entreprise, ou au contraire, un aspect plus agressif qu’attendu ? Ejikeme : Nous pensons que les entreprises familiales sont plus résistantes, surtout dans la situation actuelle. Nous recherchons des entreprises qui affichent une rentabilité élevée sur le long terme et qui réinvestissent leurs bénéfices afin de soutenir leur croissance future. Bien que nous ne puissions pas faire de généralités sur l’ensemble de l’univers d’investissement, la composante familiale renforce néanmoins l’idée que ces entreprises sont stratégiquement structurées pour résister aux fluctuations des marchés. Quel est le nombre de titres détenus en portefeuille et quelle est la pondération maximale ? Denham : Nous détenons actuellement 37 titres à travers les différents secteurs. Comme évoqué précédemment, les entreprises familiales sont peu nombreuses, voire inexistantes, dans les secteurs plus réglementés tels que les services publics, l’énergie, les matériaux de base et les services financiers. L’exposition aux entreprises varie de 1 à 10 %, les cinq principaux titres que nous détenons actuellement se situant entre 4,5 et 7 %. Par ailleurs, nous adoptons une gestion de conviction ce qui explique que nos dix premières positions représentent 46 % de notre portefeuille. Est-ce le bon moment pour investir dans les entreprises familiales ? Ejikeme : Afin de faire face à l’environnement actuel incertain, marqué par une hausse de l’inflation et des taux d’intérêt, nous continuons à nous concentrer sur les segments les plus résistants du marché. Cette approche s’aligne avec notre intérêt pour les sociétés de croissance de qualité, affichant une rentabilité à long terme plus élevée et une volonté de réinvestir leurs bénéfices pour soutenir leur croissance future. Nous restons sous-pondérés dans certains des secteurs les plus cycliques, tels que l’énergie, les matériaux et les services financiers et bancaires, car les opportunités restent très limitées, en particulier dans les entreprises familiales. En ce qui concerne la sélection des titres, nous continuons à rechercher entreprises de qualité, moins sensibles au cycle, principalement dans les secteurs de la consommation et de la santé. Enfin, nous recherchons également des entreprises qui présentent une solide gouvernance. Lorsque nous identifions des opportunités d’amélioration sur cet aspect, nous nous engageons directement avec l’entreprise afin de mettre en œuvre les mesures nécessaires.

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